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Lancés
en 2023, les Etats généraux de l’information
(EGI) visent à poser les bases d’un nouveau modèle
d’espace médiatique, alors que la presse écrite
comme audiovisuelle traverse une crise de
confiance majeure de la part des Français.
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Conviée
pour y représenter la C F T C le 30 janvier
2024, Imane Harraoui a pu y décliner les
propositions de la Confédération pour
revitaliser le 4ème
pouvoir, sur lesquelles elle revient
ci-dessous. |
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Seulement 37% des français auraient vraiment
confiance dans les médias. C’est ce
qu’indiquait en novembre 2023 une étude de
l’institut Kantar, qui évalue chaque année le
rapport des citoyens français à la presse écrite
et audiovisuelle. Un rapport d’autant plus
contrarié, suite à l’explosion des réseaux
sociaux : moins prisés par une catégorie de
citoyens qui leur préfèrent désormais Facebook,
Youtube ou X (ex Twitter) – y compris pour
s’informer – les médias
traditionnels se voient fragilisés économiquement. Ils sont aussi contraints de modifier leur traitement de
l’information, accéléré et altéré par ces
nouveaux usages. Dès lors, comment assurer le
maintien d’un paysage médiatique capable de
fournir aux citoyens une information éthique et vérifiée,
par des organes de presse qui offrent un cadre de
travail sain à leurs salariés ? C’est pour
tenter de dégager des solutions relatives à
l‘ensemble de ces problématiques que le
gouvernement a lancé en 2023 les Etats
Généraux de l’information (EGI).
Cette grande plateforme d’échanges – où
journalistes, professionnels des médias, citoyens,
chercheurs et syndicats sont conviés à débattre
– vise à proposer à l’exécutif un plan
d’action sur toutes les questions relatives à
l’espace informationnel, d’ici l’été
prochain.
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Différencier l’information de l’opinion ... |
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Ce 30 janvier 2024, Imane Harraoui –secrétaire générale
adjointe de la CFTC – a ainsi pu présenter aux EGI les recommandations de la Confédération.
En premier lieu, elle a rappelé la nécessité
de protéger le rôle et le sens du travail de
ceux qui sont à la source même de la
production de l’information : les
journalistes. Déjà confrontés à une
polarisation croissante des opinions accentuée
par les réseaux sociaux, ces derniers doivent
également évoluer au sein d’un paysage média
de plus en plus clivant et éditorialisé. La Présidente
du syndicat national de l’audiovisuel et des
journalistes, a rapporté que certains de ses
collègues sont inquiets de ce qui ressemble
à l’émergence d’un traitement et d’une
lecture de l’information biaisée. Evidemment,
un organe de presse peut avoir une ligne éditoriale.
Néanmoins, on observe dans certains médias
que les faits sont souvent lus et interprétés
à travers un commentaire politique et polémique
– souvent délivré par des pseudos experts
– qui relève davantage de l’opinion que
de l’information.
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Ce phénomène d’éditorialisation croissante des
contenus médiatiques a pu participer à générer
des imprécisions, des propos insultants, voire de
la désinformation. Des dérives que reflètent les
amendes que l’ARCOM (Autorité de régulation de
la communication audiovisuelle et numérique)a
prononcées à l’égard de diverses chaines de télévision
et journaux, ces dernières années. Néanmoins, ces
amendes semblent souvent insignifiantes, au regard
des recettes des médias concernés, souligne
Imane Harraoui. La CFTC recommanderait plutôt
que la loi permette de sanctionner en fonction
d’un pourcentage du chiffre d’affaires, qui
augmenterait en cas de récidive.
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Combattre la précarisation des journalistes ... |
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Cette banalisation du « commentariat » n’est pas
le seul facteur qui a pu dégrader l’opinion
que les Français se font des médias. Le statut des
journalistes, en précar
isation croissante, fragilise
notoirement leur capacité à produire de
l’information qualitative, sourcée et vérifiée. L’accélération du tempo médiatique a ainsi contraint une frange de
la profession à abandonner pour partie les
sujets de fond (reportages, documentaires,
enquêtes, analyses) au profit de la rédaction
d’articles courts, de brèves ou de
pastilles. Des formats réalisés de plus en
plus souvent à la pige, ou dans le cadre de
contrats courts. Dans l’audiovisuel, l’émergence
de l’information en continu et l’accélération
du traitement de l’information ont augmenté
les besoins en contenu des chaines de télévision,
poursuit Imane Harraoui. Pour y répondre,
celles-ci font de plus en plus appel à des
pigistes, précaires donc, mais aussi à des
agences externes, comme des sociétés de
production audiovisuelle.
Pour
des raisons de coût, ces prestataires se
voient confier des sujets de fond, qui
auraient pourtant pu être attribués à des
journalistes en contrat. précise Imane.
Ces derniers peuvent alors être cantonnés à
des sujets plus « hard news », pour répondre
aux besoins informationnels immédiats de leur
employeur. Ces journalistes en contrat,
peuvent donc subir une forme de perte de sens
au travail. Par ailleurs, ces agences externes
ou certains médias TV emploient eux-mêmes
des journalistes, qui opèrent souvent en CDDU,
des contrats à durée déterminée dont
l’utilisation est réservée à certains
secteurs d’activités. En
principe, ces contrats ne concernent pas les
journalistes, mais plutôt les techniciens et
les intermittents du spectacle. Pour la
CFTC, il faudrait renforcer les contrôles et
sanctions imputables aux employeurs, afin
qu’ils arrêtent d’employer illégalement
des journalistes en CDDU |
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Pour des médias
plus représentatifs de la société
française
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Le rapport plus distancié des français aux médias
classiques pourrait aussi être la résultante
d’un paysage médiatique trop homogène, qui
ne favorise pas le sentiment de représentativité
de tous les citoyens. Même si des progrès
ont pu être réalisés ces dernières années,
les femmes et les intervenants issus de la
diversité restent minoritaires à la télévision,
observe Imane Harraoui. Les catégories
socioprofessionnelles supérieures (CSP +)
seraient, à contrario, sur-représentées sur
les plateaux. Celles-ci mobiliseraient 74% du
temps d’antenne, alors qu’elles représentent
28% de la population. On peut théoriser que diversifier davantage les profils des
intervenants – qui seraient issus de milieux
sociaux plus hétérogènes – pourrait
permettre de diminuer certains biais cognitifs
propres aux protagonistes médiatiques, comme
aux téléspectateurs.
En
parallèle, pour diminuer l’effet délétère
des informations inexactes ou parcellaires
souvent délivrées par les réseaux sociaux, la CFTC milite pour la mise en œuvre d’une éducation
suivie aux médias :
Les enseignants pourraient suivre un module de
formation aux médias ou être accompagnés
d’experts journalistes, pour s’emparer du
sujet et l’aborder, par exemple, dans le
cadre des cours d’éducation civique ou de
temps spécifiquement dédiés. Dès l’école
primaire, on pourrait songer à sensibiliser
les enfants à ces enjeux, en vue de former
des citoyens qui ont un rapport instruit à
l’information. |
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Trouver de
nouveaux modes de financement
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Impossible, enfin, de ne pas envisager des modes de
financement alternatifs aux médias
traditionnels, dont les revenus publicitaires
ont chuté de 43% entre 2000 et 2017. Une
tendance qui s’est confirmée les années
suivantes : selon l’Observatoire de
l’e-pub SRI, la publicité numérique (dont
les revenus sont en grande partie captés par
Google et les réseaux sociaux) représentera
en 2024 les deux tiers du marché français
de la publicité, soit deux fois plus que
la publicité captée par les médias
traditionnels. La part du gâteau a été
braquée par ces géants du web.. La CFTC
serait, elle, favorable à une forme de rééquilibrage
économique, via une contribution ciblée de
ces multinationales du numérique qui ne
sont pas soumises aux mêmes règles et ne
paient pas leurs impôts en France. Obtenir
que les sociétés technologiques et
annonceurs contribuent efficacement au
financement du journalisme fait
justement partie des enjeux prioritaires de
ces EGI. Des enjeux plus que jamais cruciaux,
alors que le maintien d’une presse
plurielle, déontologique et économiquement
viable reste l’un des déterminants
essentiels d’une démocratie saine et
fonctionnelle. |
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L’émergence
de l’intelligence artificielle et le
recours à l’IA générative – y compris
par les journalistes – pose aussi
question. Pour la CFTC, la machine ne doit
jamais se substituer à l’homme : ces
IA devraient se limiter à aider les
journalistes à gagner du temps sur des tâches
à faible valeur ajoutée dans la
fabrication de leur sujet ou article.
Par
ailleurs, l’utilisation d’IA génératives
étrangères convoque de nombreux risques :
D’abord,
les données récoltées par ces IA
n’appartiennent pas aux médias,
resitue Imane Harraoui. Ensuite,
remarquez que le monde entier peut utiliser
Chat GPT, qui se sert de toutes ces données
pour affiner son fonctionnement. Or, les
notions d’éthique et les cultures ne sont
pas les même d’un pays à un autre :
Chat GPT pourrait opérer selon un mode de
pensée qui répond à une politique, une éthique
différente de celle qui est la mienne en
tant que Française et Européenne.
Pour
la CFTC, la co-construction d’une
intelligence générative française, voire
européenne, devrait ainsi être sérieusement
considérée, afin de préserver notre indépendance
technologique dans le domaine de l’I A.
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