Monsieur le Président,
Le rapport sur
l’état des services est un encensoir destiné :
En externe, à « vendre » nos services et leurs mérites,
En interne, à conforter les troupes dans les vertus de la course au progrès
(j’ai bien dit la course, car ce n’est pas le progrès que conteste la
CFTC, mais la frénésie.)
Si le rapport
n’élude pas totalement les problèmes, il ne les étudie pas non plus.
A sa lecture
un agent aurait le tournis et en conclurait : « ah, c’est
pour cela qu’on en peut plus ! »
La gestion
courante prend plus de temps que la gestion du changement. Certaines de
vos équipes, Monsieur le Président, ne se préoccupent que du
changement. D’autres ne règlent que les affaires courantes. D’autres
enfin se préoccupent des ressources humaines et des moyens de
fonctionner.
Sur le terrain, nombreux sont celles et ceux, quel que soit leur grade,
qui font tout cela à la fois.
C’est bien
entendu le titre III et ses quelques pages qui retiennent tout d’abord
l’attention des organisations syndicales. Il faut comprendre, assurer
les affaires courantes et penser et préparer l’avenir en se référant
au passé pour que le changement serve à quelque chose.
La notion de
progrès est liée à celle de temps. On ne peut demander à des agents de
renier le passer. Il faut avec eux dessiner et construire l’avenir en
garantissant la réussite au présent.
Or lorsque
nous lisons le rapport, nous passons en revue un audit et des
statistiques, autant d’instruments de mesures diverses et variées,
souvent produites par le terrain de façon redondante (si, si...) qui
dessinent un monde mécanique, complexe et irréel où seuls les chiffres
donneraient l’exacte mesure des réalités.
Le grand désarroi
d’un pan entier de notre réseau, lié à HELIOS, n’apparaît pas à
la lecture de ce document. Il s’agit pourtant d’une réalité qui
touche lourdement le réseau.
La charge
inimaginable que constituent les réformes qui s’empilent et créent de
véritables carambolages n’apparaissent pas plus !
Réformiste la
CFTC croit au progrès pour l’homme, généré par l’homme
La plupart des
indicateurs sont des outils inspirés des méthodes du secteur
concurrentiel et dit « libre. » Cela ne nous dérange pas à
la CFTC, sauf lorsque ces outils ne répondent qu’à
seule une loi : celle du marché. Si le marché n’est pas
au service des femmes et des hommes, il n’a aucun sens. L’outil ORE ou
l’outil GPEEC n’ont plus de sens s’ils ne sont que des instruments
budgétaires. Nous demandons d’ailleurs un réexamen des modalités de
cet instrument qui nous paraît peu pertinent sur certains points (et qui
reste impertinent dans le fond, mais c’est un autre débat !).
Certaines de
vos démarches en termes de gestion des ressources « humaines, »
de « management » (nous préférons l’animation) et de
formation démontrent votre intérêt pour les agents.
Hélas ces
efforts sont bien en deçà des pressions qui pèsent par ailleurs sur les
femmes et les hommes de ce réseau.
Les ressources
« humaines » sont faites d’une "pâte" souple,
adaptable, flexible même, mais qui a ses limites.
Nous voyons bien sur le terrain les fêlures, les brisures, les cassements
qui s’opèrent. Les agents les plus dévoués, les plus dynamiques et
plus enclins au progrès se désespèrent devant l’accumulation de
certaines situations chaotiques.
Le changement
permanent des codes, des repères, des outils et des priorités devient
abrutissant et contre productif.
La gestion des
mutations et des carrières, avec les promotions - sanctions (familiales
et financières) ne conforte pas les agents dans l’idée de progrès.
La CFTC préconise
la mise en place d’un « contrat de
performance sociale. » Plus qu’un indicateur ; il
s’agirait de la mesure d’un engagement.
Les rapports
avec les usagers ne sont pas simplifiés. Nous avons une multitude
d’offres et d’obligations nouvelles qui rendent nos services
illisibles et multiplient les encombrements aux guichets. C’est grâce
au grand sens du service public des agents que l’édifice résiste
encore !
Les annonces d’innovations en terme d’animation du réseau, d’écoute
et de prise en compte des inquiétudes et des ressentiments des agents, et
de gestion sociale des réformes nous semblent très modestes et bien
moins maîtrisées que les termes du contrat de performance.
La chape de
plomb qui fait office de couvercle de la marmite s’alourdit encore. Cela
peut exploser ou imploser. Et certaines déclarations intempestives et démagogiques
plus que réfléchies et républicaines de certains responsables
politiques sont autant d’étincelles plus explosives que progressistes.
Dans la vie
professionnelle il y a deux voies :
Celle de l’engagement
Ou celle de l’indifférence.
Seule la première
voie permettra de progresser.
Mais la
lassitude ou l’écœurement peuvent inviter les agents à choisir la
seconde.
Nombreux sont ceux pour qui les jeux sont faits : on désorganise le
service public pour mieux l’enterrer. C’est ce mouvement qu’il faut
éviter. Il faut vous donner les moyens de convaincre, de les animer
d’un souffle efficace.
« L’état
des services » ou « les services ... dans quel Etat ? »
(Etat
avec un E majuscule, bien entendu !)
Merci,
Monsieur le Président.
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